Dieppe 1942. La catastrophe

Dieppe 1942. La catastrophe

On sait que le raid sur Dieppe, à l'été 1942, a été un grave échec tactique, mais l'on considère généralement dans la littérature qu'il a permis «d'engranger» des leçons et enseignements pour préparer les débarquements ultérieurs, de Normandie et de Provence. Dans cette étude particulièrement fouillée, Bill Rawling, historien canadien, reprend en détail toute l'histoire de cette opération, des premiers préparatifs à la libération des soldats prisonniers (1948 Canadiens faits prisonniers à Dieppe) à la fin de la guerre.

S'appuyant sur une volumineuse documentation et de très nombreuses archives référencées en bas de page (on regrette toutefois l'absence d'une bibliographie finale, même si l'auteur s'en explique), Bill Rawling porte un jugement équilibré mais sans concession sur les responsables politiques et hauts militaires anglais mais aussi canadiens (ce qui est plutôt rare) qui prirent la décision d'engager cette opération, mal préparée et mal conduite (chap. 1 à 3). La description du déroulement du débarquement et des combats (chap. 4 à 9) est impressionnante par sa précision. Les différents commandos et régiments, les différentes plages, les quartiers généraux et les postes de commandement, l'aviation, la marine ou le soutien «santé»: tout est passé au peigne fin. Le texte courant est accompagné de nombreuses citations puisées aux sources les plus diverses, du simple soldat aux officiers supérieurs. Alors qu'aucun des objectifs majeurs du raid n'a été atteint (et que «le Royal Regiment of Canada fut anéanti sur les galets, de même que le Essex Scottish»), le rembarquement sous le feu allemand est «une opération improvisée dans une situation où les communications étaient intermittentes». Pour l'auteur, «la division la mieux formée de l'armée canadienne avait souffert des pertes telles qu'elle était inapte au combat» et en 1943 encore, mieux valait ne s'attaquer, avec des moyens renforcés, qu'à l'Afrique du Nord française aux maigres défenses. On apprécie, dans les derniers chapitres du livre, que l'auteur tente de retrouver les enseignements «à chaud» de ces événements tels qu'ils ont pu être formalisés à l'époque, aussi bien au sein des forces britanniques que pour le commandement allemand ou pour la population française; mais également qu'il s'intéresse longuement aux conséquences et aux effets des très nombreuses pertes sur les familles restées en Amérique du Nord, et au-delà sur l'état d'esprit général de la population canadienne.

Un excellente synthèse qui passionnera tous les amateurs de la Seconde Guerre mondiale.

Rémy Porte. 29 janvier 2013.