Briser les ailes de l'ange. Les infirmières militaires canadiennes (1914-1918)

Briser les ailes de l'ange. Les infirmières militaires canadiennes (1914-1918)

Cet ouvrage de l'historienne Mélanie Morin-Pelletier nous fait entrer dans l'univers méconnu des quelque 2 500 infirmières militaires canadiennes en service outre-mer pendant la Première Guerre mondiale. Certaines de ces «Bluebirds» ont tenu un journal, d'autres ont rédigé des mémoires pour faire connaître leur expérience à leurs familles ou au public. L'auteure, qui a parcouru le Canada à la recherche de ces documents, interroge l'image, promue par les autorités militaires, de la soignante comme mère universelle et ange de vertu. Elle montre que, malgré les nombreux écueils, ces infirmières ont trouvé dans cette expérience à la fois difficile et enrichissante la reconnaissance que la société civile de l'époque tardait à leur témoigner.

Perspective infirmière, vol. 5, no 1, septembre-octobre 2007.

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Nombreux sont les documents qui traitent de la Grande Guerre. La plupart en font la description, parlent des faits saillants, des grandes batailles, des événements historiques et des actes d'héroïsme. Certains des acteurs de la Première Guerre mondiale sont toutefois restés dans l'ombre. Ce sont les infirmières. Dans le livre Briser les ailes de l'ange, l'auteure se base sur les journaux intimes et les mémoires de certaines soignantes canadiennes qui ont travaillé, entre autres, en France, en Grande-Bretagne, en Belgique, en Russie, à Lemnos et à Salonique. À travers les pages, on y découvre ce que vivaient les infirmières au quotidien, car elles devaient panser, laver, stériliser, mais aussi réconforter. Elles nous font part des fêtes et événements, de leurs sentiments face à la guerre et ses atrocités, leur ennui et lassitude, bref, tout un pan de ce qu'était leur vie entre 1914 et 1918.

Ce livre est très bien documenté, agrémenté de notes en bas de page et d'une bibliographie impressionnante pour un si petit document. Le style est sobre, parfois redondant. Toutefois, la vie de ces êtres remarquables y est décrite de manière exhaustive, l'auteur n'omettant aucun détail. Cette dernière nous présente un regard nouveau sur la guerre, vu de l'extérieur par des femmes qui se sont dévouées à rendre le sort du soldat meilleur le temps d'un repos.

En somme, Briser les ailes de l'ange est un document passionnant où la noirceur de la guerre est éclipsée par le voile blanc des infirmières canadiennes.

Caporal M. Villeneuve (CI SQFT), Adsum, novembre 2006.

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Ce livre fait suite à une maîtrise soutenue à l’Université de Moncton  (Canada) par l’auteur. La préface de Françoise Thébaud marque l’originalité de cette étude sur un thème devenu classique, le rôle des femmes dans la Grande Guerre, en raison des documents personnels utilisés. Les 2500 infirmières canadiennes intégrées aux forces armées comme officiers sur les fronts européens et du Moyen-Orient, les Bluebirds, incarnent un nouveau type de femmes. Conséquence de la guerre de Crimée, l’infirmière anglaise Florence Nightingale, avec 38 infirmières  a commencé à créer un corps d’infirmières professionnelles reconnu et utilisé lors de la guerre des Boers; cette initiative se renouvelle en 1914.

À travers les Mémoires et lettres d’infirmières, Mélanie Morin-Pelletier donne une vision de leur vie au front  beaucoup moins aseptisée que celle souvent décrite dans les journaux et revues françaises. Elle veut «briser l’image» de la sœur et de la mère pleines de vertu. La description de la vie quotidienne de ces femmes et jeunes filles en dehors des soins apporte un éclairage nouveau sur les hôpitaux, particulièrement ceux de Salonique, de Petrograd en 1915 et en 1917, sur les trains de blessés, les pays et les villes visités.

Mais, la découverte de collègues étrangères ou issues comme elles de l’Empire britannique amène des tensions entre infirmières et auxiliaires. Leurs relations avec soldats et officiers pourtant interdites, montrent la rigueur de leur tâche  et de leur encadrement. Cela n’empêche pas les loisirs, le sport et surtout les fêtes organisées pour les blessés. Patriotisme et également désillusion devant cette guerre qui fait tant de ravages - «Nous qui avons vu les hommes anéantis - dit l’une d’entre elles, marquent la plupart de ces femmes qui doivent se réadapter à la vie civile. Certaines se sont mariées, d’autres continuent un travail social. Ce livre décrit bien le quotidien de ces «anges» confrontés à l’expérience de guerre et à la rigueur militaire  mais qui restent malgré tout humaines et parfois pleines d’humour.

Chantal AntierGuerres mondiales et conflits contemporains